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10:00| | Prédications | Elisabeth Parmentier

Le sens de la liturgie

Prédication St Pierre – 10.11.19 – Le sens de la liturgie

 Toute cette énumération de l’épître aux Hébreux avec les noms des coryants et croyantes et toutes les pérégrinations et souffrances peut paraître bien fastidieuse ! C’est pourtant l’image qui me paraît la plus puissante poru dire le sens du culte chrétien : tout le grand mouvement de la fidélité qui arrive depuis les siècles jusqu’à nous. Toute cette nuée de témoins à laquelle nous joignons notre petite voix.

Car le sens du culte, de la « liturgie » comme « service » de Dieu (Gottesdienst) :non desconcepts ou des modèles figés, mais un mouvement de foi. Un mouvement qui court du tombeau du matin de Pâques vers les autres, cette parole des témoins qui va courir… et de la Jérusalem de Pentecôte, le mouvement de l’Esprit saint qui déverse sa puissance et libère la louange et le courage pour que les témoins puissent aller « jusqu’aux extrémintiés de laterre »  - et un mouvement qui vient nous réunir dans le temps du culte.

Il fallait donc, pour dire le sens de la liturgie du culte, un texte qui dise un appel, une rencontre, un mouvement, et une direction. Et non un moment extraordinaire, mais bien plutôt ordinaire, pétri d’humanité. Le culte protestant nous cueille dans notre humanité pour dire : c’est là que le Seigneur de gloire vient te rencontrer !

L’étonnant texte de Jean 1, 35-50 en est comme un concentré de sens. Le culte c’est cela : des hommes qui ont été trouvés, dans leur travail : ils entendent qu’il y a là une espérance.

Ils voient. Ils suivent Jésus. Is restent avec lui. Ils passent le mot à d’autres, en 3 mots et sans explications : VIENS ET VOIS !

C’est ce que le culte devrait exprimer : Viens et vois !

Même si chez nous il n’y a pas tant à voir ! Et pourtant  …. Tout est sous nos yeux, comme un chemin d’ouverture des yeux.

La Réforme n’a pas choisi le spectaculaire mais laconfiance fondamentale en Christ. Contre les « fantaisies » et les superstitions humaines la foi devait choisir la voix fiable de laparole de Dieu qui résiste aux obscurités.

Alors faisons 7 pas pour marcher dans le culte ! Non pas vers les hautes sphères ni plus près du ciel, mais de plus en plus vers l’humanité. Le culte, c’est une restauration, un temps pour prendre son souffle, avant de ressortir vers le quotidien.

 1er pas : Prendre la résonnance de la grâce première

Le 1er pas prend la mesure d’un mouvement qui ne commence pas avec nous. Nous en recevons l’écho, la résonnance. Ce n’est pas nous qui trouvons Jésus, nous sommes trouvés par une nouvelle incroyable.

C’est l’annonce de Jean-Baptiste :Voici l’agneau de Dieu. Le doigt de Jean Baptiste, représenté sur de nombreux tableaux : voyez c’est lui.

Car derrière Jean-Baptiste se tient toute la mémoire de son peuple, tout l’Ancien Testament, toute la longue attente de la foi : quand Dieu tiendra-t-il sa promesse ? Quand viendra-t-il, le Messie ? Et comment le reconnaître ?

 Nous ne faisons pas notre message, c’est le message qui fait de nous des écoutant-e-s – et peut-être des disciples.

La Réforme a remis en valeur ce retournement : le culte n’est pas un service que nous devons « faire » pour Dieu, mais ce que lui a fait pour nous – Gottesdienst est compris par la Réforme à l’inverse d’autres formes de religion : non comme le service qu’il faut rendre à Dieu mais celui qu’il nous offre. Nous y sommes consommateurs : « Venez et goûtez combien le Seigneur est bon » est l’invitation à la sainte cène. Le culte est donc gratitude et louange et non obligation.

 

2è pas : « Maître ! » - (Venir appelés par la grâce)

Le 2è pas, vous l’avez fait. Vous êtes venus, vous vous êtes déplacés  - c’est l’étonnante réaction de ces premiers disciples. Ils écoutent l’annonce du Baptiste, et …ils suivent, sans discuter !

Jésus ne quémande pas, il est déjà plus loin !

Il se retourne néanmoins et leur demande « Que cherchez-vous ? »

 Oui que cherchons-nous au juste ? Un signe, quelque chose qui nous dira : c’est bien lui que je cherche ?

Ils répondent simplement : « Maître ! », reconnaissant déjà son autorité. « Où demeures-tu ? » - autrement dit, où est ton enseignement, où est ta chapelle, qu’est-ce que tu vas nous apporter ?

 Sa réponse  est sybilline : « Venez et vous verrez »

 Nous venons, appelés ensemble, sortis de nos histoires personnelles et la première parole qui nous attend dans le culte est une parole de grâce.
« Que la grâce du Seigneur soit avec vous » : une vieille formule depuis les débuts de l’Eglise ancienne. Pour dire la parole que personne ne peut se dire à soi-même : parole qui dit que fondamentalement nous ne sommes pas abandonnés à nous-mêmes.

C’est ainsi que commence un dialogue, entre la Parole de Dieu annoncée et notre réponse, chantée, priée, confessée. Avec des mots qui nous conduisent, avec des cantiques qui nous portent, nous prenons la résonnance qui nous précède et nous y posons notre voix.

Les formes peuvent varier, car de tous les langages possibles nous essayons de nous adresser à celui qui est reconnu comme Maître, et comme les disciples nous questionnons : que pouvons-nous savoir de toi ?  Et lui de s’écahpper avec cette parole qui pourrait être comme un jeu malicieux : « Venez et vous verrez ».

 

3è pas : Être vu plutôt que voir

(confesser le péché et recevoir le pardon)

Quand nous venons, ce n’est pas à la manière des anges, mais avec ce que nous sommes, dans nos pesanteurs. Comme vous l’avez remarqué, Jésus  ne leur a pas demandé de confession préalable, il n’a pas vérifié s’ils sont des bons croyants, s’ils ont bien compris, s’ils sont courageux et endurants. Ils viennent avec leur bonne volonté, mais tout autant avec leurs inerties, leurs querelles, leurs jalousies, leurs déroutes.

C’est ce que nous osons faire, lorsque nous venons déposer au début du culte nos échecs, tout ce qui nous sépare de Dieu, de nous-mêmes, des autres. Nous l’appelons « confession du péché » – au singulier car ce n’est pas tant des actions mauvaises qu’une désorientation du cœur, qui tient Dieu à distance.

 Ce n’est pas tant nous qui voyons – que lui qui nous voit, tels que nous sommes, et nous relève, par la parole de grâce, qui nous est annoncée dans un verset biblique, parole qui nous rejoint à partir du lieu fiable de la révélation de Dieu.
La grâce est aussi un rappel du chemin à suivre – c’est le sens de ce que Calvin voulait en rappelant la  Loi après l’annonce de la grâce, qui ouvre le chemin des disciples.

 Mais la Bible, comme la vie, c’est si compliqué ! Nous n’avons plus Jésus sous les yeux. Il nous faut l’interpréter, comme il nous faut interpréter notre vie : comprendre et donner sens.

 

4. pas : « Que cherchez-vous ? »

(Interpréter : lectures bibliques et prédication)

 « Nous avons trouvé le Messie » « nous l’avons trouvé ». Nous en sommes plus humblement à demander l’aide de l’Esprit-saint pour qu’il se laisse trouver, dans la lecture des Ecritures et dans la prédication.

Mais au fond, pourquoi les deux, la lecture biblique ne suffit-elle pas ?

Il y a prédication parce que pour chaque temps le message doit êtreapporté « pour nous ». Il faut des personnes, avec leur expérience et leur réalité d’humains, qui conduisent leurs contemporains dans la traversée de l’interprétation, qui à partir de leur confrontation avec les vieux textes, redonnent le sens et la vitalité de ce qui les a fait continuer, ce qui a brûlé leur cœur. Et si vous êtes là c’est sans doute parce que pour chacun de nous il y a eu un Jean, un André, un Simon, un Philippe ou un Nathanaël qui vous sa dit «il y a là une parole qui fait vivre, qui vaut la peine, il y a là un sens ».

Tant de témoins depuis les siècles qui nous conduisent et nous aident à interpréter et à discerner qu’en Jésus c’est bien Dieu qui passe au plus près de l’humain, et qui dit à chacun-e « Suis-moi ». Tout comme nous : venus individuellement nous sommes amenés les avec les autres vers celui qui appelle ensemble.

C’est l‘humour du texte de nous faire suivre le rythme de tous ces hommes qui se suivent et se passent le relais. Il n’y a que des verbes : ils viennent, ils voient, ils suivent, ils disent !

L’action qui les réunit s’arrête lorsque Nathanël dit : « Rabbi, tu es le Fils de Dieu, tu esle roi d’Israël ». Il dit trois choses différentes, mais complémentaires : avec le titre Rabbi, il reconnaît un maître, Fils de Dieu, c’est le Messie attendu. Et roi d’Israël : la véritable souverainenté, le Royaume de Dieu.

L’Eglise chrétienne a mis dans le culte des confessions de foi. Elles sont bien souvent compliquées, avec d’anciennes formules qui ne sont plus notre langaege. . Elles essaient d’exprimer le cœur de la foi. Mais pouvoir le dire, d’une seule voix réunie à des mots de générations redits depuis les temps anciens, c’est une émotion et une puissance pariculière. Notre voix dans la chaîne des voix – en disant notre foi  nous nous faisons disciples avec eux, nous sommes portés par celles et ceux qui nous ont fait grandir et nous transmettons aux prochains.

 

5è pas : « Vous verrez le ciel ouvert »

(Repas du Seigneur)

 La communauté devient communion, autour de la table du Repas du Seigneur.

Nous y allons vers lui. Là encore, rien de spectaculaire mais un simple pain, une simple coupe mais en réalité nous y recevons la vie, toute la générosité du don du Christ pour l’humanité. Devenez ce que vous recevez, disait st Augsutin : devenez le corps du Christ que vous recevez, Faites corps avec le Christ, famille de Dieu, concitoyens des sants, bénéficiaires de la grâce.

 C’est aussi le cercle qui se tient dans un dercle bien plus large : l’Eglise de tous les temps et siècles – la nuée des témoins, ou pour le dire dans les termes de notre confession de foi : la communion des saints. Que nous ne sommes pas saints, nous le savons, et Jésus le savait bien de ses disciples. Mais les saints sont simplement ceux qui par leur baptême, pour toujours appartiennent à Dieu.


Jésus avait promis qu’ils verraient le ciel ouvert. Nous ne le voyons pas comme nous pourrions le rêver! Mais nous en pressentons l’expérience après ces siècles, les suiveuses et suiveurs de Jésus se sont succédé, et nous nous passons le relais. S’il faut une « preuve » de la vérité de ces textes, c’est le saisissement des disciples, qui se lèvent !! Qui continuent depuis des siècles à se lever – toute cette immense nuée des « témoins », ceux et celles qui « répondent » par leur vie et leur témoignage.

 

6è Pas :  Faire corps

(Intercession et Notre Père)

 Forts de ce don reçu, et dans cette communion reçue, nous faisons corps de prière ensemble pour l’humanité, dans l’intercession, les uns pour les autres, et nous prions Notre Père.

Luther  disait que dans les 2 mots se concentre tout l’Evangile : Pater Noster une « petite prière », avec deux mots tout simples mais un bouleversement énorme ; Dire « père » Pater est déjà incroyable : qu’il y a ait un Dieu qui se soucie de nous, avec bienveillance et miséricorde. Mais de plus il n’est pas « mon » père mais « notre », qui ous unit au-delà de nos sympathies ou antipathies personnelles, dans le mandat de venir le suivre et de transmettre.

C’estaussi dans ce mouvement de reconnaissance de la plénitude du don reçu que prend place l’offrande, offrande d’argent, dans le culte mais aussi dans notre vie, pour certains c’est même la dîme, le dixième pour l’Eglise engagée au service des personnes au près et au loin. La collecte que l’on trouve déjà dans le livre des Actes est dans le texte grec une « leitourgia », une action des uns en faveur des autres, qui n’est pas « charité » au sens d’un don condescendant, mais partage de ce qui est déjà reçu.

 

7. Pas : Être une bénédiction

(Envoi et bénédiction)

 Finalement, vers où nous pousse ce mouvement qui saisit les disciples : vers la vie au quotidien, vers la sortie ! Car le culte « ordinaire » n’est pas celui-ci, comme le disent les Réformateurs : le culte ordinaire c’est le lieu où nous vivons et travaillons.

C’est le sens de l’envoi qui dit la tonalité:. Venez et voyez est à présent « allez et dites »- c’est l’envoi depuis le tombeau vide et depuis la Table du Repas: allez et dites que la souffrance et la mort n’ont pas le dernier mot. Dites qu’un amour nous précède et nous a trouvés.

 La bénédiction finale est ce moment qui réunit toutes les forces de l’Esprit saint pour nous conduire vers la vie.

La bénédiction ne paie pas de mine, elle aussi est une « petite parole » un geste appermment mesuré, sans surnaturel, sans exaltation. Mais bien reçue, bien vue, elle est comme un concentré de la puissance et de la qualité d’espérance qui nous porte.

 Bénir c’est transmettre la résonnance, la parole de vie, pour que chacun-e puisse ‘Être une bénédiction ». Le culte déborde dehors dans l’engagement, dans une éthique, dans la diaconie. Et la puissance de la musique, du chant nous donne les ailes .

 C’est notre empowerment humain, dans les limites de la finitude, notre responsabilité de laisser ne serait-ce qu’un infime sillage de bénédiction là où nous allons. Une contagion de bénédiction,une conspiration de bénédiction.

Un missionnaire à qui l’on demandait où menait son chemin, répondait invarisablement : « Quel que soit le lieu, toujours vers la Maison ».

 Elisabeth Parmentier, Chaire Irène Pictet, Théologie protestante.

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